En 2011, Minerva a commenté une synthèse méthodique avec méta-analyse de Nelson et a conclu à l’absence de preuve de l’efficacité d’un traitement par antidépresseurs dans la dépression du patient atteint de démence (1,2). Récemment, Minerva a présenté les résultats d’une étude qui fait apparaître qu’une approche thérapeutique non pharmacologique prestée par les aidants familiaux serait une alternative valable dans l’approche des problèmes psychiques et comportementaux chez les patients atteints de démence qui vivent à domicile (3,4). Ces résultats ont confirmé l’avis du Centre fédéral d'expertise des soins de santé (KCE) qui demande de s’investir, à domicile comme dans les maisons de repos, dans la combinaison d’interventions psycho-éducatives et psycho-sociales pour le traitement de la démence (5).

Une synthèse méthodique avec méta-analyse de la Cochrane Collaboration publiée en 2014 a spécifiquement porté sur l’efficacité des traitements psychologiques dans la réduction de l’anxiété et de la dépression des personnes atteintes de démence ou présentant une légère régression des fonctions cognitives (6). 5 études parmi les 6 sélectionnées présentent soit un haut risque de biais d’attribution non aléatoire, soit de bais d’évaluation du fait que les mesures aient pu être réalisées non en double insu ou du fait de rapporter de manière sélective les résultats. Les traitements psychologiques relevaient de différentes approches : thérapie comportementale cognitive, conseil et thérapie psychodynamique interpersonnelle. De plus, ces traitements psychologiques faisaient partie d’interventions multimodales plus importantes dans 2 des 6 études. Les groupes témoins ont bénéficié de la prise en charge standard ou ont suivi des activités psychosociales. En raison de cette hétérogénéité clinique parmi les interventions utilisées, l’interprétation des résultats est difficile.

Pour les groupes avec traitements psychologiques, les auteurs ont observé une diminution statistiquement significative (DMS de -0,22 avec IC à 95% de -0,43 à -0,03 ; I² = 21%) mais cliniquement peu pertinente (7) des symptômes de dépression. Un effet significatif sur la diminution de l’anxiété mesurée par le clinicien au moyen de l’échelle RAID (Rating of Anxiety in Dementia) (N = 2 études, DM de -4,57avec IC à 95% de -7,81 à -1,32 ; I² = 0%) a également été montré, mais les auteurs ignorent la signification clinique de cette diminution de 4,57 sur une échelle de 18 à 54. Par contre, il n’y a pas eu d’effet significatif observé sur l’anxiété signalée par le patient (N = 2 études, DMS de 0,05 avec IC à 95% de -0,44 à 0,54) ni sur l’anxiété observée par l’entourage (N = 1 étude, DM de -2,40 avec IC à 95% de -4,96 à 0,16).

Conclusion

Cette synthèse méthodique avec méta-analyse de la Cochrane Collaboration montre que les traitements psychologiques sont efficaces dans le traitement des symptômes de la dépression et de l’anxiété chez les patients atteints de démence. Étant donné la forte hétérogénéité clinique des études incluses et leurs limites sur le plan méthodologique, ces résultats doivent être interprétés avec la prudence qui s’impose.

Références

1. Chevalier P. Patient dément et dépressif : antidépresseur utile ? Minerva online 28/10/2011.
2. Nelson JC, Devanand DP. A systematic review and meta-analysis of placebo-controlled antidepressant studies in people with depression and dementia. J Am Geriatr Soc 2011;59:577-85.
3. De Jonghe M. Approches thérapeutiques non pharmacologiques au domicile pour les symptômes psychiatriques et comportementaux des démences. MinervaF 2014;13(1):6-7.
4. Brodaty H. Arasaratnam B. Meta-Analysis of non pharmacological interventions for neuropsychiatric symptoms of dementia. Am J Psychiatry 2012;169:946-53.
5. Kroes M, Garcia-Stewart S, Allen F, et al. Démence: quelles interventions non pharmacologiques? Good Clinical Practice (GCP). Bruxelles: Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE). 2011. KCE Reports 160B. D/2011/10.273/36.
6. Orgeta V, Qazi A, Spector AE, Orrell M. Psychological treatments for depression and anxiety in dementia and mild cognitive impairment. Cochrane Database Syst Rev 2014, Issue 1.
7. Poelman T. Comment interpréter une différence moyenne standardisée (DMS) ? MinervaF 2014;13(4):51.