Revue d'Evidence-Based Medicine



Step-down des corticostéroïdes inhalés en cas d'asthme stabilisé



Minerva 2005 Volume 4 Numéro 1 Page 6 - 8

Professions de santé


Analyse de
Hawkins G, McMahon AD, Twaddle S et al. Stepping down inhaled corticosteroids in asthma: randomised controlled trial. BMJ 2003;326:1115-20.


Question clinique
Une réduction de moitié de la dose des corticostéroïdes inhalés influence-t-elle le nombre d’exacerbations chez les patients adultes atteints d’asthme stable modéré à sévère?


Conclusion
Cette étude montre que des patients atteints d’asthme modéré à sévère, qui sont stabilisés par une dose élevée de corticostéroïdes inhalés,peuvent réduire leur dose de moitié en sécurité sans effet négatif sur le contrôle des symptômes et sur leur qualité de vie. D’autres études à grande échelle devraient confirmer ces constatations.


 

Résumé

Contexte

Comme leurs effets secondaires pourraient être dose dépendants, il est conseillé de réduire la dose des corticostéroïdes inhalés dès que les symptômes d’asthme sont contrôlés. L’effet à long terme de la réduction de la dose des corticostéroïdes inhalés sur l’asthme modéré à sévère «stabilisé» n’avait pas encore fait l’objet d’une étude.

Population étudiée

Dans des pratiques de médecine générale écossaises, 259 patients âgés d'au moins 18 ans ont été recrutés s'ils présentaient un diagnostic d’asthme depuis au moins un an, asthme stabilisé par une dose quotidienne de 800 µg de propionate de béclométasone (ou dose équivalente de budésonide ou de fluticonasone). Les critères d’exclusion sont: les patients qui ont eu besoin de corticostéroïdes oraux durant les deux derniers mois ou qui ont dû faire appel à un médecin de famille ou à un hôpital en raison de plaintes d’asthme, les patients présentant des maladies sévères ou abusant de médicaments.Les caractéristiques démographiques ou cliniques ne diffèrent pas entre les deux groupes. L’âge moyen des participants est d’environ 55 ans (ET 15) et la dose quotidienne nécessaire, équivalente au béclométasone varie de 1 461,5 µg (ET 657,7) dans le groupe intervention à 1 399,2 µg (ET 623,1) dans le groupe contrôle.

Protocole de l’étude

L’étude est randomisée,multicentrique, en double aveugle et se déroule sur un an. Les participants sont répartis en un groupe «step-down» et un groupe contrôle. Dans le groupe step-down (n=130), si l’asthme est stabilisé, la dose de départ est réduite de moitié aux mois 3, 6, 9 et 12. Dans le groupe contrôle (n=129), la dose reste inchangée.L’asthme est considéré comme stable si débit expiratoire de pointe est le débit expiratoire maximal atteint lors d’une expiration forcée maximale, après une ins-piration également maximale. Ce test permet d’apprécier globalement la fonction respiratoire et peut être facilement réa-lisé en dehors d’un laboratoire d’épreuves respiratoires fonctionnelles. Ce test est peu spécifique. Sa valeur moyenne chez l’adulte est de 10 l/seconde (600 l/min). La dispersion autour de la valeur de référence est de 15-20 %. La variabilité du DEP (en %) est la différence entre la valeur la plus haute (en soirée) et la valeur la plus basse (le matin) de la journée divi-sée par la moyenne de ces valeurs, multipliée par cent.">le débit expiratoire de pointe matinal et vespéral reste, durant les deux semaines précédant la consultation,>80% de la valeur moyenne du début de l’étude, si le score de morbidité asthmatique («short asthma morbidity score») (0-8) est inférieur à 2 et si aucune aide professionnelle n’a été sollicitée en raison d’une recrudescence symptomatique.

Mesure des résultats

Le critère de jugement primaire est le nombre d’exacerbations d’asthme dans les deux groupes, défini comme un accroissement des plaintes d’asthme pour lesquelles un traitement à base de corticostéroïdes oraux est nécessaire. Les critères de jugement secondaires sont le pourcentage de patients dans le groupe step-down qui, malgré la réduction de moitié de la dose de corticostéroïdes inhalés, est resté stable, la différence entre les deux groupes pour les plaintes liées à l’asthme (par exemple hospitalisation, consultation du médecin de famille), la dose totale administrée de corticostéroïdes inhalés et oraux et le changement dans l’état de santé (selon le St. George’s Respiratory Questionnaire et l'EuroQol) et le short asthma morbidity score. L’analyse s’est faite en intention de traiter.

Résultats

Deux cent douze participants (82%) ont terminé l’étude. Le pourcentage de patients suffisamment stabilisés pour permettre une réduction de moitié des doses de corticostéroïdes est de 84% dans le groupe step-down et de 81% dans le groupe placebo. Les patients qui terminent l’étude avec une dose diminuée de moitié de corticostéroïdes représentent 49% des sujets du groupe stepdown. Quarante patients (31%) du groupe step-down et 33 (26%) du groupe contrôle rapportent une ou plusieurs exacerbations d’asthme. La différence entre les groupes n’est pas significative (OR 1,29; IC à 95% de 0,75 à 2,23; p=0,354). Les variations dans l’état de santé et pour le short asthma morbidity score ne sont pas significatives dans chacun des deux groupes. Après un an, la réduction moyenne de prescription de corticostéroïdes inhalés était de 127 mg (IC à 95% de -180 à -74; p<0,001) dans le groupe step-down par rapport au groupe contrôle. Ceci correspond à une réduction journalière de 348 µg (IC à 95% de 202 à 494) de propionate de béclométasone dans le groupe step-down. Pas de différence significative entre les doses de corticostéroïdes oraux (prednisolone) administrées (step-down 117 mg versus contrôle 109 mg; p=0,252).

Conclusion des auteurs

Les auteurs concluent que les patients asthmatiques, qui utilisent une dose d’entretien de corticostéroïdes de 1 000 µg de propionate de béclométasone ou équivalent, peuvent réduire de moitié leur dose de corticostéroïdes inhalés lorsque leur asthme est stabilisé sous traitement.

Financement

NHS R&D Programme on Asthma Management

Conflit d’intérêt

Les auteurs ont des liens avec diverses firmes pharmaceutiques dont AstraZeneca, GlaxoSmithKline, Schering Plough, Altana,Novartis, Merck et Aventis.

 

Discussion

Etude en première ligne

Cette étude en première ligne montre que des patients présentant un asthme stabilisé par un traitement de fond avec une dose relativement élevée de corticostéroïdes inhalés, peuvent réduire la dose de corticostéroïdes inhalés de moitié, en sécurité pour ce qui concerne le maintien du contrôle des symptômes et la qualité de vie. Nous devons cependant considérer ces constatations avec quelque circonspection. Il s’agit d’une population d’étude relativement réduite avec respectivement 130 et 129 patients dans le groupe step-down et le groupe contrôle. Chaque groupe utilise régulièrement des ß2-agonistes à longue durée d’action en combinaison avec des corticostéroïdes inhalés (respectivement 37% et 30% des patients dans le groupe step-down et dans le groupe contrôle). Plusieurs études ont montré que les ß2-mimétiques de longue durée d’action ont un effet d’épargne sur les corticostéroïdes 1,2. C’est pour cette raison qu’une analyse par sous-groupes excluant les utilisateurs de ß2-mimétiques à longue durée d’action est faite. Celle-ci montre, dans ce cas, l'absence de différence dans le nombre d’exacerbations entre le groupe step-down et le groupe contrôle (34% versus 24%, p=0,148).Les auteurs font eux-mêmes remarquer que leurs conclusions se basent sur un faible nombre de patients. En outre, le critère de jugement primaire, la survenue d’une exacerbation asthmatique, est défini de façon assez vague comme «un accroissement des plaintes d’asthme pour lequel un traitement oral à base de corticostéroïdes fut nécessaire». Les critères utilisés à cet effet ne sont pas mentionnés. Comme il s’agit d’une étude multicentrique, nous pouvons craindre une interprétation différente de la nécessité d’un traitement oral dans les différents centres participants. En dépit de ces insuffisances, l’étude montre clairement qu’une stratégie de step-down peut être envisagée sous certaines conditions et peut être effectivement réalisée. Cette vision est reprise également dans d’autres études.

Autres études

Une méta-analyse néo-zélandaise montre que la réponse en fonction de la dose de fluticasone sur le VEMS, sur le débit expiratoire de pointe matinal et vespéral, sur l’utilisation de ß2-agonistes à courte durée d’action, sur les symptômes nocturnes et sur les exacerbations d’asthme, atteint une phase en plateau à partir de 100 à 200 µg par jour! Chez les adultes atteints d’asthme modéré à sévère, 90% de l’effet clinique maximal atteint avec 1 000 µg de fluticasone par jour, sont obtenus avec une dose de 150 à 250 µg par jour 3. Cette méta-analyse, de même qu’une étude faite chez des enfants 4, souligne qu’il est important de déterminer pour chaque patient asthmatique la dose optimale (la plus basse) thérapeutique de corticostéroïdes inhalés. Les résultats de l’étude Hawkins se situent dans le prolongement de la méta-analyse citée ci-dessus. Il est probable que de plus faibles doses de corticostéroïdes inhalés permettent d’obtenir un même effet clinique et de le maintenir. Une étude à plus grande échelle devrait venir confirmer ces constatations.

 

Conclusion

Cette étude montre que des patients atteints d’asthme modéré à sévère, qui sont stabilisés par une dose élevée de corticostéroïdes inhalés,peuvent réduire leur dose de moitié en sécurité sans effet négatif sur le contrôle des symptômes et sur leur qualité de vie. D’autres études à grande échelle devraient confirmer ces constatations.

 

Références

  1. Byrne PM, Barnes PM, Rodriguez-Roisin R et al.Low dose inhaled budesonide and formoterol in mild persistent asthma. The OPTIMA randomized trial. Am J Respir Crit Care Med 2001;164:1392-7.
  2. Pauwels RA, Löfdahl CG, Postma ET et al. Effect of inhaled formoterol and budesonide on exacerbations of asthma. The Formoterol and Corticosteroids Establishing Therapy (FACET) International Study Group. N Engl J Med 1997;337:1405-11.
  3. Holt S, Suder A,Weatherall M et al. Dose-response relation of inhaled fluticasone propionate in adolescents and adults with asthma: meta-analysis. BMJ 2001;323:253-6.
  4. Ekins-Daukes S, Simpson CR, Helms PJ et al. Burden of corticosteroids in children with asthma in primary care: retrospective observational study. BMJ 2002;324;1374.

 

 

Step-down des corticostéroïdes inhalés en cas d'asthme stabilisé

Auteurs

Kegels E.
Vakgroep eerstelijns- en interdisciplinaire zorg, Centrum voor Huisartsgeneeskunde, Universiteit Antwerpen
COI :

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